32-Arcana

Sortir de la clinique et prendre le train représentaient déjà un exploit.

C’était un train de nuit, puis un bus à partir de Carcassonne, jusqu’à Couiza, Arcana était là, au matin, elle m’attendait. J’avais récupéré ma tente chez ma mère et je l’installais près de la sienne à Rennes les bains, dans un petit camping au pied de la montagne. Elle savait, je lui avais tout dit, se rendait-t-elle compte. Non, on ne peut pas se rendre compte mais elle savait. Elle fut parfaite, patiente et aimante. Je n’étais pourtant qu’une plaie, presque effrayé par le soleil, je m’allongeais beaucoup, il fallait compter sur une période de « coma » journalière, où je n’étais encore qu’une tête pensante, couché sur le sol. Cela dura ainsi, elle partait chercher le trésor alors perché dans « des cortex spatiaux cachés dans la montagne », le trésor de l’abbé Saunière dont elle est friande (connaissez-vous l’abbé Saunière, qu’a-t-il donc trouvé ?). Nous restâmes dix jours et elle me proposa de rentrer avec elle, à La Baule où elle habite. Je n’avais rien et non plus rien à perdre, de surcroît, je l’ai suivi. Nous vivons ensemble ainsi depuis environ cinq ans. Nous nous sommes bien habitués l’un à l’autre finalement, elle est simple et si agréable. C’est moi qui ai appris à la freiner dans ses élans, les anges n’existent pas forcément à la maison désormais, il faut penser à l’éventualité. Je commence à aller mieux grâce à l’écriture de ce blog notamment qui me fait un but, je raconte mon histoire, comme s’il le fallait enfin. Je suis resté des mois allongé, j’ouvrais l’œil parfois, je ne savais plus ce qu’étaient des journées. Depuis quelques jours je vais mieux d’ailleurs, j’ai beaucoup écrit en peu de temps, il est certain que c’est un bon signe, ma peinture finalement reprise me plaît plutôt, quelque chose essaie de prendre forme. Et pourtant je sais que tout peut s’effondrer, il y a encore une semaine, il n’y avait rien dans ma tête. Je sais cela fragile, mais je serais étonné de remonter, de remonter vraiment. Je me sens fatigué, vieilli, physiquement et psychiquement fatigué. Quel sera le lendemain ? Le bouddha se réveillera t-il un jour ou l’autre en moi. Je ne sais pas, j’aimerais voir un dieu décider.
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